Comment va lise? témoignage de Catherine Vidal psychologue EN, membre de CoSE suite
Bilan des 4 années d’arrêt des écrans et du suivi psychologique
Rappelez-vous, en septembre 2020, Lise avait un comportement similaire à celui d’un enfant TSA lorsqu’elle était rentrée en petite section de maternelle : elle ne rentrait pas en communication avec les autres enfants, ni avec les adultes, elle ne soutenait pas le regard et semblait ne pas écouter quand on lui parlait (elle semblait être dans sa bulle). Elle répépait la fin des phrases qu’elle entendait (écholalie) et des mots d’anglais comme “yellow, yellow” qu’elle répétait joyeusement sans raison apparente. Elle riait, parlait et chantait toute seule, Ses réactions étaient exacerbées à la moindre frustration (colères, pleurs…).
L’histoire de Lise: Témoignage de la maman et de la psychologue de l’école: 3 années d’observation cliquer ici
par CoSE le 16 juin 2023
L’adaptation au milieu scolaire étant très compliqué, l’enseignante avait conseillé dès la fin du premier mois d’école de prendre rendez-vous avec la psychologue de l’école.
Lors du premier entretien, la psychologue interrogeant la maman sur l’environnement de l’enfant dès sa naissance, met en évidence une surexposition précoce et excessive aux écrans (dès ses 5 mois, plus de 4 heures par jour puis toute la journée d’éveil de l’enfant).
L’hypothèse qu’un syndrome EPEE (Exposition Précoce et Excessive aux Ecrans) soit à l’origine des troubles est tout de suite évoqué et la suppression totale et immédiate des écrans est conseillée à la maman qui comprend et adhère à la proposition. A la place des écrans, Lise sera désormais stimulée par des interactions humaines, des jeux, des promenades…
Durant 4 années, Lise sera suivie par la psychologue de l’école pour réajuster la guidance parentale, elle sera évaluée trois fois par des tests psychométriques (WPPSI-4 et WISC-V) et sera aidée aussi par le RASED.
Dès l’arrêt complet des écrans, son comportement devient plus gérable à l’école et le syndrome pouvant faire penser à un TSA s’amenuise.
Questionnaire Q-CHAT utilisé à 3 reprises pour évaluer les troubles de Lise
Résultats du test psychométrique WPPSI-4
WPPSI-4 | JUIN 2021 4 ans 1 mois | MARS 2023 5 ans 10 mois | Différence / résultats 2021 / 2023 |
Compréhension verbale | déficitaire | normale | + 26 points |
Visuospatial | déficitaire | limite | + 8 points |
Raisonnement fluide | limite | limite | + 3 points |
Mémoire de travail | déficitaire | normale | + 40 points |
Vitesse de travail | déficitaire | déficitaire | + 12 points |
QIT | déficitaire | normal-faible | + 24 points |
Ces 2 évaluations psychométriques à 4,1 ans et 5,10 ans montrent que Lise a évolué positivement sur le plan cognitif :
A 4 ans, elle ne comprenait pas les questions posées et ne pouvait pas résoudre de problème de son âge. Son QIT était déficitaire de manière homogène. On relevait la persistance d’écholalie.
A 5 ans et 10 mois, certains secteurs du développement cognitif commençaient à évoluer : la compréhension verbale devenait normale mais le raisonnement visuospatial et le raisonnement fluide restaient en deçà de ce qui était attendu à son âge. La mémoire de travail était dans la norme mais la vitesse du traitement restait déficitaire.
Dernière évaluation psychométrique (WISC-V, mai 2024) à la fin du CP. Lise a 7 ans :
Elle est souriante, calme, attentive et concentrée lors de l’examen psychologique. Elle s’oriente correctement dans le temps, elle lit et comprend ce qu’elle lit (niveau mi-CP). Son écriture est de belle qualité (niveau mi-CP). Les dessins sont un peu immatures mais la différence entre les sexes et les générations des différents personnages de la famille est bien marquée.
Résultats du WISC-V :
- Indice de compréhension verbale: 95 (87-105) Normal
- Indice visuospatial: 92 (85-100) Normal
- Indice de raisonnement fluide: 97 (91-103) Normal
- Indice de mémoire de travail: 82 (75-93) Normal faible
- Indice de vitesse de traitement: 86 (79-97) Normal faible
- QIT: 91 (85-98) homogène, valide Normal
- Résultats dans la norme des enfants du même âge.
Conclusion
L’histoire de Lise illustre parfaitement ce que la surexposition aux écrans dès les premiers mois de la vie provoque en termes de blocage du développement cognitif et de retard dans le développement psychoaffectif.
Les résultats du Q-CHAT objectivent la disparition progressive en quelques mois des symptômes autistiques après l’arrêt des écrans.
Les résultats des tests psychométriques montrent que le développement cognitif s’est organisé petit à petit en passant d’un état déficitaire homogène à 4 ans à un état hétérogène normal-faible/limite à 5 ans et 10 mois pour terminer son organisation à 7 ans à un niveau normal.
Il est à noter que Lise a toujours été scolarisée à temps complet (même si en PS son comportement était difficilement gérable), qu’elle n’a pas été maintenue, qu’elle n’a pas eu de rééducation ni d’AESH.
Seules les stimulations de son environnement familial et scolaire associées au sevrage total des écrans, lui ont permis de se développer sur tous les plans.
Lise a un niveau en lecture et en écriture de mi-CP. Elle passe en septembre 2024 en classe de CE1.
Le cas de Lise n’est pas exceptionnel ! depuis les 5 dernières années, beaucoup d’enfants arrivent malheureusement en PS avec le même syndrome de surexposition aux écrans. Il est essentiel de ne pas se tromper de diagnostic et de poser des questions sur l’utilisation des écrans dès le premier entretien avec la famille !
Catherine Vidal PSY-EN
Membre de CoSE