Témoignage de Maud, orthophoniste
J’ai commencé à travailler en libéral en 2008, mes questionnaires d’anamnèse s’orientaient déjà sur le temps d’exposition aux écrans. A cette période, lorsqu’on m’annonçait un temps devant les écrans de 7h/ semaine, je trouvais cette exposition bien trop importante. 10 ans après, il n’est pas rare que l’on m’annonce des temps hebdomadaires de 20 à 40 heures. Les parents eux-mêmes ne prennent pas conscience de l’importante de cette exposition. Pour obtenir des temps plus objectifs, je reprends tout le planning jour après jour.
S’il y a 10 ans, j’observais des effets sur l’attention, la passivité des enfants et le développement du langage et de la pensée des enfants; j’observe depuis à peu près 4 ans, l’arrivée de troubles bien plus graves. Beaucoup d’enfants complètement mutiques, sauvages, qu’il est difficile de contenir dans mon bureau et d’intéresser. Je vois également des enfants dans la toute puissance qui refusent l’effort et ne parviennent pas à se concentrer plus de 5 minutes sur une activité et qui ont besoin d’un support toujours plus ludique pour que nous captions leur attention. Avec les pré-ados, de grosses difficultés comportementales me sont rapportées par les parents qui trouvent leur enfant agressif et avec qui les relations sont extrêmement tendues et basées sur le chantage avec toujours en fond cette question d’écran, que ce soit console, tablette ou smartphone.
Autre constat que je fais au sein de mon cabinet, c’est la sous-information des parents sur les effets des écrans et des précautions à prendre. Ils se rendent compte bien vite qu’ils se sont laissés dépasser par la situation et il est extrêmement difficile pour eux de revenir en arrière quand les enfants se sont habitués à la présence des écrans. Souvent, il pensait que ce n’était pas si grave voire même y voyait un côté éducatif et pédagogique, notamment pour les tablettes et smartphones. Nous sommes de plus en plus d’orthophonistes dans la région et pourtant nos listes d’attente ne font que s’étendre inlassablement. Je suis convaincue que les écrans y sont pour beaucoup